AZF 15 ans ! Toujours des questions et des doutes

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A 10 h 17 le 21 septembre 2001 l’usine AZF (AZote Fertilisants), propriété de la société Grande Paroisse filiale de Total, a explosé au sud de Toulouse. L’usine construite en 1921 à l’écart de la ville a été progressivement rattrapée dans la ville à cause de l’expansion urbaine de Toulouse. Sur 70 hectares, elle employait 500 personnes pour produire en grande partie des ammonitrates agricoles et en plus petite quantité des nitrates d’ammonium industriels, mais aussi de la mélamine, des résines et des produits chlorés tels que l’ATCC et le DCCNa.

Lors de l’explosion de l’usine, 31 personnes ont perdu la vie et environ 2500 personnes ont été blessées. Le site d’AZF a été en partie soufflé et de nombreux dégâts ont été observés dans tout le Sud Ouest de Toulouse. Les dégâts matériels ont été estimés à environ 2 milliards d’Euros.

15 ans plus tard les traces de la catastrophe industrielle sont de moins en moins visibles, mais de nombreux toulousains sont marqués à jamais par cet accident.

Une stèle commémorative est installée devant un monument
Une stèle commémorative est installée devant un monument, y sont inscrits les noms des 31 victimes

De la lointaine poudrerie à AZF dans la ville

Une longue histoire

En 1852, la municipalité de Toulouse décide de transférer la poudrerie historique du centre de la ville (Ile de Tounis) vers le sud de l’île du Ramier, dans un endroit plus isolé. Pendant la Première Guerre Mondiale, la poudrerie de Toulouse devient l’une des plus grandes de France et l’industrialisation du site se renforce par la construction d’une poudrerie supplémentaire. En 1918 le site industriel couvre près de 400 hectares, du sud de l’Ile du Ramier au Nord de l’actuelle Zone du Chapitre.

Le vendredi 21 septembre 1781 vers 10h30, la Poudrerie de Toulouse avait explosé ne faisant que des dégâts matériels dans le faubourg Saint Michel.(source)

En 1924, le site de cette seconde poudrerie est choisi comme lieu d’implantation de l’Office National Industriel de l’Azote (ONIA), qui prendra le nom de Grande Paroisse en 1987, puis d’AZF en 1990.

La ville encercle le plateau chimique

Après la Seconde Guerre Mondiale le site compte jusqu’à 30’000 emplois. Ce besoin de main d’œuvre est comblé par la construction d’ensemble d’habitations à proximité de l’usine.

Le Rond Point du 21 septembre
Le Rond Point du 21 septembre est à 2 kilomètres de l’usine AZF, il est officiellement nommé un an après l’explosion

Parfois ce sont l’ONIA ou la poudrerie qui participent à la construction de ces quartiers. Ainsi la poudrerie fait construire des logements dans les quartiers Saint Roch. De son côté l’ONIA participe activement au développement du quartier Papus. Par la suite des quartiers entiers sont construits à proximité des 2 usines pour répondre à l’expansion urbaine.

Empalot est construit alors que la poudrerie qui a été bombardée à la fin de la Seconde Guerre Mondiale ne refonctionne pas. Les experts pensent que l’usine ne repartira pas et ne considèrent pas l’ONIA comme dangereuse.

Certains de ces quartiers sont construits sur d’anciens terrains du pôle chimique ayant appartenu à la poudrerie ou à l’ONIA.

Au début des années 70 les 2 usines sont encerclées par les habitations.

C’est aussi dans ces conditions qu’un centre de formation sort de terre. Au départ, c’est un centre de formation professionnel qui devient par la suite le centre d’apprentissage Gallieni.

Sur l’ile du Ramier c’est la résidence universitaire Daniel Faucher qui est construite à partir de 1954. Les bâtiments de la résidence universitaire jouxtent les moulins abandonnés de la poudrerie.

En face de la SNPE, sur la pointe de l’ile du Ramier se trouvait l’Institut de Génie Chimique (Ecole Nationale Supérieure des Ingénieurs en Arts Chimiques et Technologiques INP-ENSIACET) qui a depuis été remplacé par le Casino.

AZF 15 ans après !

15 ans après le site de l’Usine AZF a été dépollué. Au Nord du terrain de l’ancienne usine, se trouve une zone grillagée elle abrite des vestiges de l’usine et le cratère formé par l’explosion. L’endroit semble oublié, mais quand on s’approche, on se doute que de nombreuses personnes l’ont visité et peut être pillé.

Le cratère formé par l'explosion est grillagé
Le cratère formé par l’explosion du hangar 221 est grillagé, il est impossible d’y accéder

La pôle chimique est à la moité du XXème siècle un important pourvoyeur d’emplois à Toulouse. L’industrie chimique participe activement au développement économique de la ville.

Un mur vestige d’un des hangars de l’usine est encore debout. Il est solidement étayé pour ne pas s’effondrer. Il est recouvert des graff’ récents.

Tout autour la végétation est dense, elle cache des conteneurs métalliques dont certains sont ouverts.

Une imposante pièce tubulaire, vestige de la production industrielle responsable de la catastrophe, domine ce vaste espace en friche grillagée. Les lapins y sont nombreux et il n’est pas rare de croiser renards et autres sangliers.

Le mur du hangar 224 voisin du hangar 221 qui a explosé est couvert de graffitis
Le mur du hangar 224 voisin du hangar 221 qui a explosé est couvert de graffitis

Au milieu, une zone de mémoire a été installée. On y trouve les stèles et un monument souvenir de cette dramatique journée. Le poste de garde avait résisté à l’explosion, mais pour des raisons de sécurité, il a été détruit le lendemain de l’explosion. Depuis il a été reconstruit à l’identique. À travers les vitres on peut apercevoir quelques photos.

Monument à la mémoire des vicitimes de la catastophe d'AZF
Monument à la mémoire des victimes employées par l’usine AZF lors de l’explosion du 21 septembre 2001

Au moment de l’explosion l’usine est toujours appelée ONIA par les toulousains, depuis on ne parle plus que d’AZF

Plus au Sud a été construit l’Oncopole. Sur ce site on remarque immédiatement le bâtiment aux allures futuristes qui borde la route, mais c’est tout un campus qui est sorti de terre.

Un peu plus loin sur les bords de Garonne dans d’anciennes gravières subsistent des ballastières, de lieux de stockage d’anciens explosifs de la première guerre mondiale. De l’autre côté d’un bras de Garonne en face du cratère reste le site Herakles ex SNPE (Société nationale des poudres et des explosifs). L’usine n’abrite plus de phosgène un gaz dangereux.

AZF, toujours dans les mémoires

L’explosion a été entendue jusqu’à Pamiers, Castres et Montauban

Quand on parle avec les toulousains on se rend compte que l’épisode d’AZF est toujours très présent. Certains disent même qu’ils ont l’impression que c’était hier.

Le monument constitué de colonne
Le mémorial représente le cratère formé par l’explosion de l’usine AZF, il émet un son qui rappelle les sirènes de l’usine

La grande tour Rouge et Blanche qui dominait l’usine a été démontée durant l’été 2013

La journée du 21 septembre 2001 reste gravée dans les mémoires des toulousains.

Tous les toulousains se souviennent de ce qu’ils faisaient à 10 h 17 quand l’usine a explosé, faisant voler en éclat les quartiers entourant le site de Grande Paroisse, mutilant de nombreux toulousains et tuant 31 personnes. Tous les toulousains se rappellent des heures qui ont suivi. Aujourd’hui encore certains ont peur lorsqu’une porte claque lorsqu’un pétard explose.

Ils ont vécu l’explosion d’AZF

J’avais la main sur l’interrupteur quand ça a explosé, je pensais que j’avais fait sauter le quartier. J’ai eu des informations assez tardivement sur ce qu’il s’était réellement passé. J’étais inquiète pour le reste de ma famille, mais tout le monde a pu rapidement me rassurer avant que l’on puisse se retrouver dans la soirée

Mic(M, Mère au foyer, 48 ans le 21 septembre 2001)

J’étais en classe au lycée quand tout a volé en éclat. J’ai reçu du verre sur le visage, j’ai eu que de petites coupures contrairement à mes camarades qui étaient proches des fenêtres. Aujourd’hui j’ai des problèmes auditifs à cause d’AZF.

(G, Lycéen, 17 ans)

Je partais vers Montauban par l’autoroute, j’ai entendu comme une explosion. Ce n’est qu’en arrivant à destination que j’ai l’on m’a dit « c’est l’ONIA qui a explosé ». Les téléphone ne répondaient pas, je n’ai découvert mon appartement ravagé qu’en rentrant. Heureusement personne de mon entourage n’a été blessé, mais nous avons été profondément marqués.

(E, Consultant, 33 ans)

Je rentrais tout juste de Floride, mon retour avait été retardé après le 11 septembre. Forcément quand ça a explosé j’ai immédiatement pensé à un attentat comme dans les Tours Jumelles.

(L, Fille au Pair, 22 ans)

J’habitais dans un immeuble de la cité Papus qui a été très touché par l’explosion. Réfugié chez des amis, ce n’est qu’en voyant les premières images de ce qu’il restait d’AZF et en entendant le récit de Pierre Nicolas (Journaliste de France3) que j’ai réalisé l’ampleur des dégâts.

(A, Manutentionnaire, 43ans)

J’avais 5 ans, je n’ai pas compris. Je vu tout s’écrouler autour de moi. Ma Mère est venue me chercher à l’école, elle pleurait. La maison était éventrée, on nous a changé les fenêtres 2 mois après l’explosion. J’ai des problèmes auditifs, j’ai peur de l’orage et des feux d’artifices.

(J, Ecolière, 5ans)

AZF, toujours des questions

Avant le 21 septembre 2001, les toulousains avaient peur que l’usine AZF ou celle de la SNPE explose.

Les batailles d’experts n’ont jamais permis de comprendre l’origine de la réaction chimique qui a fait exploser le hangar 221 de l’usine AZF. La catastrophe a révélé l’incompatibilité jusqu’alors inconnue entre l’ammonitrate et les produit chlorés pour piscines (DCCNa ou dichloroisocyanurate de sodium)

Mais des doutes existent. Certains experts pensent que l’explosion de l’usine AZF est peut-être liée à un autre phénomène. Les thèses qui reviennent le plus sont l’attentat, l’explosion souterraine d’une nappe de gaz et le problème électrique.

AZF, 2 procès et bientôt un troisième

15 ans après l’explosion de l’usine AZF, 2 procès se sont déroulés. Le premier en 2009 se termine par la relaxe de Grande Paroisse et du directeur de l’Usine AZF.

L'entrée de l'Usine a été reconstruite
L’entrée de l’Usine a été reconstruite

15 ans après l’explosion de l’usine AZF il existe encore de nombreux sites SEVESO entourés par des habitations.

Lors du procès en appel, en 2012, Grande Paroisse et le directeur de l’usine sont condamnés.

Le 13 janvier 2015 la cour de cassation reconnaît l’impartialité de l’une des magistrates de la cour d’appel de Toulouse. Un nouveau procès doit avoir lieu en janvier 2017, il sera délocalisé à Paris.

15 après l’explosion de l’Usine AZF les commémorations se dérouleront en ordre dispersé. Le traumatisme de l’explosion est toujours présent et certaines plaies ne peuvent se refermer.

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