Lorsqu’on parle de photographie, un sujet revient fréquemment, surtout parmi les débutants et les amateurs : les EXIFs. Ces fameuses métadonnées, enregistrées dans chaque photo numérique, regroupent une multitude d’informations techniques telles que les réglages de l’appareil (ouverture, vitesse d’obturation, ISO, etc.) ainsi que d’autres paramètres comme la focale utilisée ou encore la marque de l’appareil. Nombreux sont les photographes qui se fient à ces données comme à une recette, cherchant à reproduire les conditions exactes d’une photo qu’ils admirent. Sur les forums et les groupes Facebook, on observe une véritable obsession autour des EXIFs, comme si le simple fait de connaître les réglages précis pouvait garantir une réussite photographique similaire.
Pourtant, s’appuyer sur les EXIFs d’une photo sans comprendre le contexte de prise de vue est une approche réductrice qui ignore un aspect fondamental de la photographie : la lumière et la créativité du photographe.
Avant de commencer, que sont les EXIFs
Les EXIFs (Exchangeable Image File Format) sont des métadonnées techniques automatiquement enregistrées par les appareils photo numériques lorsqu’une photo est prise. Ces données comprennent des informations telles que l’ouverture du diaphragme, la vitesse d’obturation, la sensibilité ISO. On trouve aussi des détails sur la focale, la balance des blancs ou encore la date et l’heure de la prise de vue.
Elles permettent aux photographes de connaître les réglages exacts utilisés pour une image donnée, et sont souvent consultées pour comprendre les paramètres techniques derrière une photo. Cependant, bien que les EXIFs soient utiles, ils ne racontent pas toute l’histoire d’une image. Ils ne garantissent pas la reproduction d’un résultat similaire, car ils ne tiennent pas compte de facteurs essentiels comme la lumière ou l’intention artistique.
EXIFs : Une recette sans les ingrédients
Les EXIFs sont souvent comparés à une recette de cuisine, mais ils manquent d’un ingrédient crucial : le contexte. Prenons l’exemple d’un photographe qui a capturé un magnifique paysage avec une ouverture de f/11, une vitesse d’obturation de 1/200s, et un ISO de 100. En voyant ces réglages, un autre photographe pourrait penser qu’en reproduisant exactement ces paramètres, il obtiendra une image similaire. Cependant, cette approche ne tient pas compte d’éléments majeurs tels que :
- La qualité de la lumière au moment de la prise de vue : La lumière peut être douce, dure, directionnelle, diffuse, naturelle ou artificielle. Ces variations influencent énormément l’image finale et ne sont pas capturées dans les EXIFs.
- La composition de l’image : Le cadrage, la manière dont le sujet est placé dans la scène, ou encore les choix artistiques ne sont pas visibles dans les EXIFs.
- Les conditions météorologiques : Une scène photographiée par beau temps en pleine lumière ne sera pas la même que sous un ciel nuageux.
- L’intention créative : Les EXIFs ne disent rien sur ce que le photographe voulait transmettre à travers son image. Par exemple, un réglage ISO élevé peut être utilisé pour créer une ambiance granuleuse et sombre, alors qu’un ISO bas favoriserait une image claire et nette.
Ainsi, même si les EXIFs donnent des informations sur la « recette technique », ils laissent de côté tous ces aspects cruciaux qui, en réalité, font toute la différence entre une photo moyenne et une photo exceptionnelle.

La dépendance aux EXIFs dans les forums et groupes Facebook
Il est frappant de constater à quel point les forums et les groupes Facebook sont remplis de discussions centrées sur les EXIFs. On y voit souvent des commentaires du type : « Quels réglages avez-vous utilisés pour cette photo ? » ou « Peux-tu partager tes EXIFs ? ». Bien que cette curiosité soit compréhensible, elle reflète une certaine dépendance aux données techniques, une approche qui limite la créativité.
Certains photographes, par crainte de ne pas « bien faire », se sentent obligés de reproduire les EXIFs d’autres images qu’ils admirent, espérant ainsi obtenir des résultats similaires. Cela peut donner l’impression qu’il existe une recette magique pour chaque situation photographique, ce qui, comme nous l’avons vu précédemment, est loin de la réalité.
Cette approche ne favorise pas l’apprentissage. Se focaliser uniquement sur les réglages techniques d’une image empêche de développer son propre regard et de comprendre la photographie au-delà des paramètres mécaniques de l’appareil. Il est certes utile de connaître l’ouverture et la vitesse d’obturation utilisées dans une situation donnée, mais cela ne devrait pas être perçu comme une solution universelle.
Pourquoi les EXIFs ne sont qu’un point de départ ?
Si l’analyse des EXIFs peut fournir des informations intéressantes sur les décisions techniques prises par un photographe, elle ne doit pas être considérée comme une recette à suivre aveuglément. Voici pourquoi :
- La photographie est situationnelle : Les réglages utilisés pour une photo de paysage à midi ne fonctionneront probablement pas pour une scène de nuit. Chaque situation est unique, et il est indispensable de savoir lire la lumière et de comprendre comment elle affecte l’exposition.
- Les EXIFs ne racontent pas toute l’histoire : Comme évoqué plus haut, les EXIFs ne capturent ni l’intention créative ni les choix esthétiques du photographe. Ils fournissent une base technique, mais la magie d’une image réside bien souvent dans les éléments qui ne peuvent pas être réduits à de simples chiffres.
- Chaque photographe a son propre style : Un autre danger à se fier trop aux EXIFs est de perdre sa créativité. En essayant de reproduire les réglages des autres, on risque de négliger le développement de son propre style photographique. Or, la photographie, comme tout art, est une expression personnelle.
Exemple : photographie de portrait
Imaginons un portrait réalisé avec une ouverture de f/1.8, une vitesse d’obturation de 1/500s et un ISO de 200. Ces EXIFs ne disent rien sur la distance entre le photographe et le modèle, la qualité de la lumière (douce, diffuse, naturelle ou artificielle), ni sur l’interaction entre le photographe et le sujet qui a permis de capturer une certaine expression. Si un autre photographe tente de reproduire ces mêmes réglages, sans prendre en compte ces facteurs, il ne pourra pas obtenir le même résultat.
Apprendre à se détacher des EXIFs
L’un des meilleurs conseils que l’on puisse donner à un photographe débutant est d’apprendre à lire la lumière, à observer la scène et à ajuster les réglages en fonction de l’ambiance souhaitée. Il ne sert à rien de suivre aveuglément les EXIFs d’une autre image. Pour progresser, il est essentiel de :
- Comprendre les principes fondamentaux du triangle d’exposition. Plutôt que de mémoriser des réglages, apprenez à anticiper comment la lumière et le mouvement du sujet affecteront vos choix techniques.
- Tester différentes combinaisons de réglages dans des conditions variées. En expérimentant, vous apprendrez à ajuster vos paramètres selon le contexte et à développer votre propre instinct photographique.
- Analyser vos propres photos : Regardez les EXIFs de vos propres images et demandez-vous pourquoi tel réglage a fonctionné ou non. Ce processus d’auto-analyse est bien plus enrichissant que d’essayer de reproduire les réglages des autres.
Conclusion : Les EXIFs ne sont pas une recette magique
En fin de compte, bien que les EXIFs puissent fournir des indices sur les décisions techniques d’un photographe, ils ne constituent pas une recette magique. La photographie, ce n’est pas de la pâtisserie. Il ne suffit pas de suivre des étapes prédéfinies pour obtenir un résultat parfait. Chaque situation est unique et nécessite une approche adaptée en fonction de la lumière, du sujet, de l’ambiance et de l’intention créative.
Les EXIFs ne doivent donc pas devenir une béquille sur laquelle on s’appuie pour éviter de penser par soi-même. La clé de la réussite en photographie est de comprendre les principes sous-jacents, d’expérimenter, et surtout de développer son propre regard. Les outils techniques sont là pour vous soutenir dans votre démarche créative, mais ce qui fait la différence, c’est votre capacité à interpréter la scène et à prendre des décisions éclairées en fonction de vos objectifs photographiques.
Apprenez à vous détacher de l’idée de la recette toute faite et embrassez la flexibilité et la liberté qu’offre la photographie !


















