On a déjà tout raconté sur la mobilisation contre la réforme des retraites. Actuellement, les syndicats tentent de garder une mobilisation dans l’attente de la décision du Conseil Constitutionnel. Mais il apparait de plus en plus difficile de faire venir des manifestants dans les cortèges.
Au cout de la mobilisation s’ajoute celui de la peur des coups des forces de l’ordre. Aujourd’hui, encore plus que lors du rejet de la motion de censure contre l’utilisation du 49.3 on sent dans la manifestation une forme de résignation.
Vendredi soir, après la manifestation toulousaine, le Conseil Constitutionnel rend son verdict.
Trop d’images sur les casseurs et le black bloc ?
Du côté des médias, on sent la lassitude à leur manière de traiter une actualité récurrente. Les journalistes cherchent des angles différents. Alors quand il se passe quelques chose qui change de l’ordinaire, ils ne manquent de se pencher dessus. C’est notamment le cas quand il y a des violences dans les manifestations. Le feu, la violence attirent toujours les caméras et permettent aux journalistes de faire des images. Au final, les revendications des manifestants disparaissent derrière les violences.
En mettant en avant les violences, en leur faisant faire la une de tous les journaux, et autres JT, les personnes opposées à la réforme des retraites réfléchissent à deux fois avant de se rendre dans une manifestation. Plus que la peur des casseurs, ces opposants ont peur des forces de l’ordre, de leurs réactions. Ils ont peur d’être pris pour cible, de partir en garde à vue ou d’être blessés par les armes utilisées.
Manifestation du 13 avril à Toulouse
Comme on pouvait s’y attendre, il y avait bien moins de manifestants par rapport aux précédentes manifestations. Les syndicats annoncent 70’000 manifestants, mais on peut en douter tant le cortège paraissait réduit. On peut tout autant douter des chiffres de la préfecture qui semblent comme souvent très en deçà de la réalité. La préfecture indique la présence de seulement 9’000 manifestants à Toulouse.
Les violences des manifestations, la pluie et la lassitude ont sans doute démotivé les manifestants. Pour ceux régulièrement présents, le cout des grèves commence à peser lourd dans les finances des foyers. Heureusement, certains limitent les pertes en faisant appellent aux caisses de grèves.
En dehors de quelques vitrines prises pour cibles, de quelques murs tagués, la manifestation contre la réforme des retraites s’est déroulée dans le calme. Les quelques manifestants un peu virulents ne paraissaient pas avoir très envie d’en découdre avec les forces de l’ordre.
La police montre les muscles
À l’avant du cortège, des manifestants qui ne défilent avec les syndicats avaient pris un peu d’avance sur le reste du cortège dont le rythme était dicté par les étudiants. Pour contenir ces quelques manifestants, le commissaire n’a rien trouvé de mieux que de menacer de faire usage de la force contre ces manifestants. Pour ce faire, il a utilisé un mégaphone inaudible. Mais cela a eu pour effet de stopper les quelques manifestants qui marchaient calmement en discutant.
Première sommation : nous allons faire usage de la force. Quittez immédiatement les lieux
Cette intervention est vécue par les manifestants comme une forme d’agression. Ils ne comprennent pas pourquoi ils sont ainsi pris pour cible alors qu’ils défilent dans le calme.
Dans les rues autour du cortège, on aperçoit la silhouette des agents de Compagnie Départementale d’Intervention chargés d’empêcher aux manifestants de se diriger vers le centre-ville. Les étudiants scandent leurs meilleurs slogans contre la police, les manifestants sifflent ou huent les agents qui ne bougent pas. Ils veillent sur l’avant du cortège ou se retrouvent à chaque fois le Black-Bloc.
Le canon à eau pour accueillir les manifestants à Jean Jaurès
En bas des allées Jean Jaurès, un cordon de gendarmes mobiles encadre le canon à eau. Ils imposent l’arrêt de la manifestation. Dans le calme, les manifestants se dispersent. Certains partent à pied, d’autres sautent dans le métro. Devant les gendarmes mobiles, un skateur et une personne en BMX font quelques figures sous l’œil amusé du journaliste David Dufresne qui est en direct sur Twitch.
Une manifestation en attendant l’avis du Conseil Constitutionnel
À Toulouse, il a été fait le choix de manifester avant de connaitre l’avis du Conseil Constitutionnel. Ailleurs, les manifestations se déroulent parfois plus tard dans la journée. Sur les réseaux sociaux, certains appellent à manifester devant le Capitole à 18 h.
Dans le cortège, il manque de nombreuses personnes. Beaucoup ont manifesté la veille, mais ils sont absents aujourd’hui. Il reste les irréductibles. À l’avant, un cordon de la Compagnie Départementale d’Intervention (CDI) impose le rythme. Le commissaire dirige ses hommes et, comme la veille à l’aide d’un mégaphone, menace de faire usage de la force.
Arrivé vers la place Jeanne d’Arc le cortège marque une pause. Les manifestants semblent ne pas vouloir avancer. Quelques manifestants profitent de l’occasion pour casser les derniers abris-bus encore debout.
Un peu de lacrymo avant une évacuation musclée de Jean Jaurès
Au loin, on devine la présence des CRS qui encadrent le canon à eau. Un cordon de CRS bloque le passage en direction de la place Wilson. Les manifestants se dispersent dans le calme. Les CDI qui sont partis en courant dans les petites rues, poussant les manifestants. Pour disperser plus rapidement les manifestants, ils utilisent quelques grenades lacrymogènes.
Sous les platanes qui libèrent leur pollen le gaz piquent plus qu’à l’habitude. Les pollens qui volent depuis le début de la manifestation fait pleurer les manifestants. Autour des yeux déjà humides à cause du pollen, les gaz lacrymogène vient se coller.
Rapidement le calme revient, les CRS ont retiré leur casque. Les CDI eux, font face à une poignée de manifestants. Certains manifestants viennent contre les boucliers des agents vider leur sac, parfois avec véhémence.
Au bout d’un long moment, les agents décident d’avancer et d’évacuer les derniers manifestants présents. La pluie commence à tomber. Quelques coups de matraques tombent. Les agents des CDI utilisent leurs gazeuses pour repousser les manifestants qui refusent de partir.
Les plus malins ont su contourner le cordon mis en place par les forces de l’ordre. Ils se rendent rapidement place du Capitole.
Place du Capitole, rien malgré l’annonce du Conseil Constitutionnel
Place du Capitole, un petit millier de manifestants s’est regroupé. Sou la pluie, l’ambiance parait morose. Peu à peu, les petites rues autour de la place du Capitole sont fermée par les forces de l’ordre.
Avec la pluie, le nombre de manifestants présents fond lentement.
À 18 h, le Conseil Constitutionnel rend son rapport
Le Conseil Constitutionnel étudie les différents articles d’un point de vue du droit et de la constitution.
Il dispose de 3 possibilités :
- Valider tout le texte
- Valider certains articles et rejeter les articles problématiques
- Rejeter tout le projet de réforme des retraites
Le Conseil Constitutionnel doit se prononcer sur le fond et sur la méthode qu’a choisi le gouvernement pour mener les débats à l’Assemblée Nationale et au Sénat.
Son avis est très attendu par tout le monde. Le gouvernement souhaite voir son texte validé quand les opposants à la réforme des retraites souhaitent que le texte soit rejeté.
Peu avant 18h, le Conseil Constitutionnel valide un grand nombre des articles de la réforme des retraites. Les articles rejetés concernent des articles qui n’avaient rien à voir avec le budget. Ils pourront être intégrés à une prochaine loi.
Il ne dit rien au sujet de la méthode utilisé. Le Conseil Constitutionnel valide le fait que le gouvernement peut contourner les débats à l’Assemblée Nationale.
L’avis du Conseil Constitutionnel sur le RIP
En plus de valider ou pas le texte de la réforme de retraites, le Conseil Constitutionnel devait étudier la proposition de RIP (Référendum d’Initiative Partagée). Ici aussi, le Conseil Constitutionnel rejette la demande de RIP.
La raison est subtile. Le RIP demandait que l’age de la retraite reste à 62 ans. Mais au moment du dépôt de demande du RIP l’age de départ légale de départ à la retraite était encore de 62 ans.
Une nouvelle demande de RIP a été formulé par la NUPES. Le Conseil Constitutionnel rendra sa décision le 3 mai.
Et maintenant après 3 mois de mobilisation ?
Dans la nuit, Macron promulgue la réforme des retraites
Dans la nuit, Macron s’est empressé de promulguer la réforme des retraites. Il faut désormais attendre que sortent les décrets d’applications. Le gouvernement souhaite depuis le début que la réforme des retraites soit mise en place à partir de septembre 2023.
Pour l’opposition, c’est du foutage de gueule.
Pour le gouvernement, l’après réforme des retraites avec une victoire à la Pyrrhus
L’après réforme des retraites va se révéler difficile pour le gouvernement. Peu importe le résultat, il a réussi la prouesse de réunir les français contre lui. La démocratie est affaiblie. On voit dans les proches de Macron des opportunistes plus intéressés par la forme que par le fond. La division parait profonde et il ne fait aucun doute que les prochaines échéances électorales réserverons de mauvaises surprises.
À l’Assemblée Nationale, la majorité se montre bien fragile. Une dissolution longtemps évoquée parait très dangereuse. Le gouvernement pourrait alors perdre sa faible majorité et voir 3 groupes s’opposer.
Le RN (ex FN) risque de profiter de la situation lors de prochaines élections. La gauche, notamment la NUPES semble stagner voir en difficulté pour réunir les français tant la campagne de dénigrement à son égard est importante. On devine quelques fractures autour de la NUPES notamment du côté des reliquats du PS et du Parti Communiste.
Pour les syndicats, que faire après la mobilisation record contre la réforme des retraites ?
Après une mobilisation inédite, les syndicats doivent continuer à se renforcer pour défendre le droit des travailleurs. Seulement 8% des travailleurs du privé sont aujourd’hui syndiqués. La mobilisation importante n’a jamais imposé un réel blocage de la France. Pourtant, un tel bras de fer aurait sans doute permis de faire plier le gouvernement. Le contexte actuel n’a pas permis de mobiliser plus de monde.
Certains ont contourné les grèves et autres blocages en télétravaillant. Lors de précédents conflits sociaux, le blocage de la France permettait de mettre une plus grande pression sur le gouvernement, mais cela pouvait nuire à l’image des syndicats.
Les syndicats donnent rendez-vous le Premier Mai, Jour de la fête du travail.